On a encore du mal à réaliser que la vie peut être aussi douce, sans violence, sans aucune forme de conflits ni contradictions. Le climat y est pour beaucoup. Là où règne le froid s’usent à la besogne des gens qui ont fait du travail leur doctrine. Le travail n’est pas la santé. Pour être en bonne santé il faut pouvoir vivre avec passion, et qui peut y prétendre ? Tout ce que nous faisons c'est bosser pour bouffer, avoir un toit, des habits, gérer la scolarité des enfants, et la distraction. Sans oublier son petit verre et sa cigarette. Ce n’est certainement pas là une vie passionnée et joyeuse. Mais qu’est-ce que la joie, être joyeux ?
On connaît le plaisir né de l’envie et du désir, mais on est ignorant de la joie. On recherche les sensations. Le plaisir est une quête sans fin de sensations. Dès lors qu’un plaisir est assouvi, un autre se présente, et ainsi de suite. Et plus on y pense, plus on désire. Le plaisir est éphémère et laisse vite sa place à la frustration et à la peur de ne pouvoir répéter la sensation demain. Il y a ensuite de la frustration, car l’objet du désir n’a nullement engendré la joie. Il n’a fait qu’assouvir un insaisissable besoin de devenir et d’identification. Mais l’insatisfaction demeure.
On se construit au travers des images, en s’identifiant à elles, pour donner forme à l’ego. Avoir une belle voiture, y être attaché, prendre du plaisir à la posséder, c'est exister au travers d’une représentation, d’une image, d’un symbole. On s’identifie aussi aux idées, aux idéologies, aux croyances, aux convictions et à la souffrance.
On se crée une certaine image de soi ayant des principes, des valeurs et tout le reste. Mais si l’on observe bien, rien de tout ceci n’amène la joie, bien au contraire. L’accumulation en couches successives ne fait qu’engendrer plus de conflits. Mais sans joie tout ceci n'a pas grande valeur. On espère créer une existence accomplie, heureuse, en paix, mais le fait est que le quotidien n’est que lutte, tension et frustration.
Ceux qui ne se reconnaissent pas dans ce schéma, ceux qui sont bien logés, nourris et blanchis, ne connaissent pas non plus de joie car l’ingrédient principal est manquant. On observe plutôt un esprit de supériorité, de complaisance, de suffisance, un manque d’empathie et de sensibilité. Quant à ceux qui souffrent, il y a urgence, car le bateau prend l’eau. Pour les autres il ne semble y avoir aucune urgence. On entretient plutôt le statu quo. On œuvre pour sauvegarder ses privilèges, entretenir sa réussite, son statut.
Se pose tout de même la question du désordre mondial et de notre part de responsabilité, du rôle qu’on peut y jouer.
La pauvreté, la souffrance, la violence, les guerres, le désastre écologique, la malnutrition, les épidémies, le pillage des ressources, l’extinction des espèces etc. Tout ceci est bien réel. Cela compromet l’avenir de nos chérubins, n’est-ce pas ? Ce n’est pas acceptable. Et pour les plus cyniques et bien figurez-vous que tout va bien. Ils ne voient pas où est le problème. Ce sont les plus aveugles de tous. Ces questions se posent plus facilement chez ceux qui ont le luxe ne pas courir après l’argent, car ceux qui souffrent ont assez de problèmes comme ça pour s’occuper des problèmes des autres. On ne peut avoir de la compassion que lorsqu’on est libéré des problèmes.
Comment peut-on contribuer à rendre ce monde meilleur ? On ne peut échapper à cette question si l’on est un tant soit peu sérieux et concerné. Y répondre c’est trouver sa place dans l’univers, et trouver la joie. Mais la réponse doit être totale, et non partielle. Elle doit régler la cause et non les symptômes.
Il semble qu'on soit tous occupés à traiter les symptômes, particulièrement, à petits coups d’initiatives externes, espérant ainsi que par la multitude d’actions amélioreront les choses progressivement. Ajouter à cela un peu d’éducation, et le tour serait joué, pense-t-on.
Mais qu’est-ce qu’une action juste ? Existe-t-il une action vraie et totale ? Ce qui est sûr c’est que la multitude d’initiatives ne semble apporter que des conflits, aucune amélioration en vue. On aimerait pouvoir sortir un carnet de chèque et régler ainsi les problèmes, selon ses moyens. Mais cela ne fonctionne pas ainsi, malheureusement ! La raison est très simple. On est responsable du désordre, personne d’autre. Tant que nous ne changeons rien dans nos relations aux autres, aux choses et aux idées, tant qu'on ne reconsidère pas sa posture, rien ne changera durablement.
On a laissé la pensée tout gouverner mais doit-il en être ainsi ? La pensée a sa place dans les domaines techniques et technologiques par exemple. Mais en relation avec les autres, elle est néfaste. Ce n’est qu’une fois l’ego disparu qu'on peut parler d’une transformation durable et d’un monde meilleur. Là est le salut pour l’humanité, nulle part ailleurs. Si l'on veut réellement changer le monde, il faut abandonner l’ancien cerveau et fonctionner depuis un espace vierge, spontané, neuf, et non conditionné. Il faut abandonner ce qui a pris des dizaines d’années à construire. Est-on prêt à un tel renoncement ?
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